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Gbagbo: “Je vous laisserai demain un pays debout”

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Gbagbo: “Je vous laisserai demain un pays debout”

Message par webmaster » déc. 20, 04 6:33 am

  Le président gbagbo aux jeunes africains : “Je vous laisserai demain un pays debout”

Notre Voie - 12/19/2004 8:16:10 PM


Je suis heureux d'être là parce que nous mènons une révolution démocratique dont les gens ne comprennent pas toujours le sens. Nous mènons une révolution pacifique et démocratique que les gens veulent dévoyer. Mais nous ne laisserons pas les gens de mauvaise foi dévoyer notre noble combat (applaudissements). Je voudrais demander seulement une chose : qu'on nous laisse travailler; qu'on nous laisse travailler; qu'on nous laisse travailler ! (la salle répond en chœur).

Pour nos amis qui viennent d'arriver de l'extérieur, je ne voudrais pas faire mon parcours. Ce n'est pas important. Mais je voudrais seulement dire les obstacles qu'on me met, les attaques que je reçois depuis que j'ai été élu par le peuple de Côte d'Ivoire le 22 octobre 2000. Avant d'égrener ces obstacles, je voudrais vous signaler que j'ai commencé véritablement mon combat en décembre 1969. Nous avons créé la première organisation dont une branche deviendra plus tard le FPI, à Strasbourg (en France), dans une chambre d'étudiants dans la chambre de mon ami Assoa Adou, qui est aujourd'hui ministre des Eaux et Forêts. Il était étudiant en médecine. Nous étions quatre.

Pendant ces trente années de combat dans l'opposition, jamais je n'ai pris aucune arme contre aucune institution de la Côte d'Ivoire (applaudissements). Jamais, pendant ces trente années, alors que je subissais les affres de la prison-mon père a été en prison, moi-même j'ai été en prison, mon oncle a été en prison, mon épouse a été en prison, mon fils a été en prison, ma sœur a été en prison-mais jamais, jamais, nous n'avons songé à prendre les armes contre la Côte d'Ivoire. Parce que nous croyons en nous. Parce que nous avons confiance en nous. Et nous avons confiance en notre relation avec le peuple. Nous savions que, tôt ou tard, ce peuple-là, que nous défendions, allait nous reconnaître et nous donner le pouvoir.

Quand on a confiance en soi, on ne prend pas les armes pour faire la guerre civile. Quand on a confiance en soi, on ne cherche pas les fusils comme moyen d'accession au pouvoir (…). Donc j’ai été élu le 22 octobre 2000. Cette élection était un peu comme des données qu'on met dans l'ordinateur. Dans beaucoup de capitales européennes, ils ont mis un certain nombre de données. Et ils ont tenté des touches, mais la feuille qui est sortie n'indiquait pas mon nom. Ils se réveillent un matin, on dit que c'est Laurent Gbagbo qui est président. Ils disent: “Mais, ce n'est pas ce que l'ordinateur nous a donné!”. Mais ça dépend de ce que vous avez mis dans l'ordinateur comme données de base. Ils ont été surpris. Ils ont été étonnés. Mais ils vont d'étonnements en étonnements (applaudissements). Parce que ce n'est pas eux qui décident qui doit gouverner la Côte d'Ivoire. C'est le peuple de Côte d'Ivoire qui décide qui doit gouverner la Côte d'Ivoire (ovations). C'est tout simple mais c'est difficile à comprendre pour eux. C'est simple mais c'est très difficile pour eux à avaler.

Donc, dès que j'ai été élu, on a dit : “D'ailleurs, Gbagbo est mal élu. Il est mal élu, il faut reprendre les élections”. Alors j'ai dit: “je ne reprendrai rien. Nous ne reprendrons rien”. Il y a un chef d'Etat africain que j'ai rencontré un jour. Il avait dit sur une radio qu'il faut reprendre les élections parce que Gbagbo a été élu avec très peu de gens. Parce que ceux qui ont participé aux élections ne sont pas nombreux. Quand je l'ai rencontré, je l'ai pris dans un couloir et j'ai dit : “ Toi, pour ton élection, le taux de participation était de 21 %. Pour mon élection, le taux de participation était de 37% et j'ai été élu avec 59%. Je n'avais pas été élu avec un score africain. Alors, 21 % et 37 %, je ne veux plus t'entendre parler de ça, sinon, je vais te répondre ” (applaudissements).

Pour ne pas brouiller les relations diplomatiques, il y a des choses qu'on ne dit pas publiquement, mais quand on se retrouve, on peut se permettre de dire des vérités. J'ai été bien élu. Mais seulement leur candidat n'était pas là. Ce n'est pas mon problème à moi. J'ai dit plusieurs fois que j'ai été élu dans des conditions calamiteuses. Certains qui ne comprennent pas bien français disent : “Gbagbo a dit qu'il a été élu dans des conditions calamiteuses, ça veut dire que son élection a été mauvaise”. Vous voyez comment les gens ne comprennent pas ? Parce qu'après la proclamation des résultats, il y a eu des bagarres dans les rues et il y a eu des morts. Ce qui fait que nous n'avons même pas fait la fête pour que ceux qui n'ont jamais été au pouvoir et qui y arrivent fêtent au moins leur victoire. Nous n'avons pas fait cette fête. “J'ai été élu dans des conditions calamiteuses” ne veut pas dire que je suis mal élu. Je suis très bien élu mais dans des conditions calamiteuses (applaudissements).

La langue française a ses règles, il faut la comprendre pour commenter une phrase en français. A un moment donné, ils ont cessé de dire ça pour s'attaquer à autre chose : “Gbagbo a créé un charnier. Il a tué des gens, il y avait 50 personnes tuées, entassées dans un coin, en brousse. Et que toutes ces personnes sont musulmanes”. Alors j'ai demandé à savoir comment on fait pour reconnaître un cadavre musulman. C'est un peu difficile. Vous trouvez plus de 50 corps quelque part et ce qui est curieux, c'est que la première personne à en parler est un journaliste français de RFI. Le réflexe normal d'un Ivoirien qui découvre un tas de cadavres, c'est d'aller à une gendarmerie ou à un poste de police. Son premier réflexe n'est pas d'aller à RFI. Alors, je me suis contenté de dire : “Ecoutez, dans ces bagarres que mes adversaires ont organisées c'est nous qui avons perdu le plus de monde. Il y a eu plus de 300 morts. Alors, ne me parlez pas seulement de 50. Si on veut parler des morts de 2000, parlons de 300 morts et ne me parlez pas de morts d'une certaine religion par rapport à des morts d'une autre religion. Un mort n'a plus de religion”. Alors, progressivement, ça a cessé.

On a dit, par la suite qu'en Côte d'Ivoire, il y a la xénophobie ; un autre thème de campagne. Comment un pays qui reçoit tous les Africains de tous les pays d'Afrique un pays qui reçoit tous ceux qui sont venus du Liban au moment de la guerre du Liban; un pays qui reçoit tous les Européens de tous les pays d'Europe peut-il être traité de xénophobe ? Alors j'ai dit à quelqu'un que quand on nous traite de xénophobes, c'est un hommage à notre pays. Parce que dans un pays où il n'y a aucun étranger, on ne peut pas dire qu'il y a de la xénophobie. S'il n'y a aucun étranger chez vous, on ne peut pas dire que vous êtes xénophobes. Parce que la xénophobie se définit comme une attitude vis-à-vis des étrangers.

Mais, chez nous, il faut que nos amis sachent que, officiellement, il y a 26 % d'étrangers. C'est le taux le plus élevé au monde après, peut-être, Doubaï. Mais la différence, c'est qu'à Doubaï, on ne peut pas devenir Doubaï. Quand vous êtes étrangers, vous ne pouvez pas devenir Doubaï, alors qu'en Côte d'Ivoire, tous les étrangers qui sont ici peuvent devenir Ivoiriens, s'ils le désirent, sur une simple demande. Tout le monde peut devenir ivoirien s'il le veut. Et je suis le président qui a signé le plus de décrets de naturalisation depuis que la Côte d'Ivoire existe (applaudissements). Cela est vérifiable en comptant dans le journal officiel et je n'ai pas fini encore mon mandat. Je n'ai peut-être pas encore fini mes mandats (applaudissements).

Ils ont vu que la thèse de la xénophobie ne tenait pas parce que les chiffres parlaient contre une telle thèse. Donc, ils ont dit : “La Côte d'Ivoire est première productrice de cacao, mais le cacao est produit par les enfants-esclaves”. Nous avons fait front devant tout ça. Le cacao a été introduit en Côte d'Ivoire à la fin du 19ème siècle. Non seulement je n'étais pas encore né, mais ni mon père ni ma mère n'étaient encore conçus. Et voilà que c'est le jour où je deviens président de la République qu'on découvre que le cacao ivoirien est produit par les enfants-esclaves. Nous avons invité des journalistes du monde entier à venir se promener dans les plantations de cacao (rires). C'est risible, c'est petit; c'est minable, c'est ridicule (applaudissements). Tout cela est méprisable; et nous les méprisons. On ne vous demande pas de m'élire. On vous dit que je suis président. Un point, un trait ! (applaudissements).

Les Ivoiriens ont élu celui qu'ils veulent. Où est votre problème!? Jusqu'à présent, sur cette question, je ne comprends pas les problèmes des autres. Où est leur problème? On dit : “Gbagbo ne nous prend pas dans ses mains” . Les Ivoiriens qui sont concernés m'ont élu. Où est votre problème ? Vraiment, ça c'est une grande question sur laquelle on va faire des colloques. Où est le problème des autres? Quand ils élisent leur président, moi, j'envoie un message de félicitations. Je n'ai jamais rien dit sur les pratiques d'un chef d'Etat voisin ou lointain. Mais ça ne veut pas dire que je ne sais pas. Je pense que, pour que les Etats vivent tranquillement, sereinement, il ne faut rien dire. Donc je ne dis rien. Moi, je n'ai rien fait mais , eux, ils disent que j'ai fait des choses que je n'ai pas faites. Ils parlent … Dites-leur que ce n'est pas leur problème si je suis élu.

Donc, ils ont essayé tout ça.Tout cela était appuyé par des faits de violence. Les plus significatifs ont lieu d’abord les 7 et 8 janvier 2001 où ils ont tenté de faire un coup d'Etat. Ils ont même pris la radio et la télévision. Nous les avons chassés de là. Et la tentative de septembre 2002 est la seconde. Certains disent que les rebelles descendaient du Nord et les Français les ont arrêtés au Centre. Ce n’est pas vrai. Ils ont attaqué d'abord Abidjan. Ils ont concentré le plus gros de leurs forces à Abidjan. A Abidjan, ils ont attaqué la Brigade anti-émeute (BAE), la gendarmerie d'Agban, l'école de gendarmerie. Ils ont bloqué la route du camp militaire d'Akouédo. Nos soldats se sont battus et les ont chassés d'Abidjan. C'est ça qui est la vérité (applaudissements).

Et comme dans leur fuite nous n'avions pas les moyens logistiques pour projeter nos militaires derrière eux, puisqu'ils s'enfuyaient vers le Nord, j'ai donc demandé de l'aide à la France. J'ai demandé à la France de mettre à notre disposition deux ou trois hélicoptères. Naturellement, la France a refusé. On comprendra plus tard pourquoi (applaudissements).

Ce coup d'Etat a échoué donc puisqu'ils ont été repoussés. Jusqu'à la fin de la médiation d'Eyadéma à Lomé, il y avait une nature de cette attaque que je vais vous expliquer. La CEDEAO a convoqué une réunion à Accra, c’était Accra I. On a discuté. Les chefs d'Etat, pour manifester leur solidarité, ont pris une très belle résolution. La plus belle d'ailleurs depuis que cette crise est née. La plus belle sur papier, et on a créé un comité de médiation qu'on a confié au président Eyadéma. Mais, jusque-là, on considérait qu'il y avait des rebelles contre l'Etat de Côte d'Ivoire et qu'il fallait convaincre ces rebelles pour qu'ils déposent les armes et qu'ils partent. C'était le sens d'Accra I et de Lomé. Alors, l'Etat que je représente a envoyé une délégation conduite par le président du Conseil économique et social, Laurent Dona Fologo, comprenant tous les partis qui étaient au gouvernement. Cette médiation, on ne l'a pas laissé aller jusqu'à son terme. Pendant qu'elle se déroulait, on a convoqué Marcoussis.

A partir de Marcoussis, la nature du conflit a été changée par les négociants.
On n'a plus considéré l'Etat de Côte d'Ivoire. On a convoqué des partis politiques à Marcoussis et on leur a demandé de signer une déclaration. Moi-même, j'ai pris connaissance de ce document lorsque je suis arrivé à Paris pour la réunion de Kléber. J'ai été mis devant le fait accompli , mais je ne suis pas un pleureur. Je ne pleure pas. J'ai regardé le document. Le contenu était simple : “ Gbagbo, pour le moment, tu vas rester-là, mais donne ton pouvoir à quelqu'un que nous te désignons et petit à petit on va te pousser à la mort et après tu partiras, et puis celui que nous attendons viendra s'installer ”. Mais moi, je ne ferai pas ça !(applaudissements). J'ai regardé le papier et j'ai dit : “ #Eux-là, la lutte ne fait que commencer #!” (applaudissements). La lutte ne faisait que commencer. Et la lutte a commencé effectivement.

Et, petit à petit, les poissons nageurs dont on ne voyait que les écailles, on a découvert leur visage. Celui qu'on a découvert aujourd'hui, je ne sais pas si c'est le plus gros ou le dernier. En tout cas, #il est gros # (rires et applaudissements)…
Marcoussis plaçait les rebelles sur le même pied que l'Etat. C'est inacceptable. Marcoussis nous a contraint à mettre des rebelles, des tueurs, des assassins, des violeurs dans le gouvernement. Et, en plus, ils sont incapables. Donc le travail n'avance pas. Mais ça, c'est du passé ; on marche vers l'avenir.

Beaucoup disent aujourd'hui : “pourquoi Thabo Mbeki ?” Il est venu, il m'a parlé comme un homme. Il m'a parlé avec respect parce que lui, il sait ce que tout ça veut dire. D'où il vient, ils ont connu l'apartheid. Ils ont connu les emprisonnements. Ils ont connu les tueries. Ils ont connu les assassinats des militants. Et Dieu faisant bien les choses, pendant qu’il était ici chez moi, à 500 ou 600 mètres à l'Hôtel Ivoire, le 9 novembre, l'armée française a tiré sur les jeunes manifestants aux mains nues.

Thabo Mbeki était là. Donc, il s'est fait une idée in vivo. Alors, la discussion a pris une autre forme, une autre dimension. Nous avançons. Aujourd'hui, nous voilà. Ce n'est pas Gbagbo qui est là. Ce n'est même pas seulement la Côte d'Ivoire, mais aujourd'hui, l'Afrique est là. Aujourd'hui, l'Afrique est là devant elle-même. Le fils de Lumumba est présent. Donc je vais citer un exemple qui vient de Congo et un exemple qui vient de Côte d'Ivoire.

Quand Lumumba s'est battu pour l'indépendance et qu'il a été élu, il y a d'autres Congolais dont je ne vais pas citer les noms parce que je ne voudrais pas blesser leurs descendants, mais qui s'offraient aux Belges, aux Français pour dire : “Lumumba, il est trop révolutionnaire. Laissez-le et mettez-moi à sa place, je vous rapporte le pays”. Ça ne ressemble pas à quelque chose ça!? (la salle répond par l'affirmative). Il y a des gens qui ne connaissent pas l'histoire de leur propre pays. Ceux-là ont aidé à tuer Lumumba pour que les Européens les prennent et les mettent au pouvoir. Au moment où Lumumba comptait sur le peuple pour arriver au pouvoir, eux, ils comptaient sur l'extérieur pour arriver au pouvoir chez eux. Ça ne vous dit rien ?

Mais, même ici, Houphouet a gagné parce qu'en 1949 et en 1950, pendant qu'il luttait, pendant que Anne-Marie Raggi, qui est morte et qu'on enterre aujourd'hui (samedi 18), lançait la grève contre les produits importés, il y avait, pendant ce temps-là, des Africains qui allaient voir les Français, leur gouverneur, pour dire :“Nous sommes là, enlevez Houphouet, il est révolutionnaire, il est trop anti-français. Mettez-nous à sa place”. Mais, ils ne peuvent pas vous mettre à sa place. C'est le peuple qui l'a élu!

Donc quand les indépendances ont été proclamées, ils ont institué ce phénomène par les coups d'Etat. On veut quelqu'un, on enlève l'autre. On vient, on l'enlève par un coup d'Etat, on encercle des adversaires. Il faut que cette tentative de coup d'Etat soit la dernière! (applaudissements).
Que veut l'Afrique dans son partenariat avec l'extérieur? L'Afrique est demandeur parce que l'Afrique, du fait de son histoire, a accusé un retard technologique, financier et économique. Mais l'Afrique est souveraine. Dans la discussion avec elle, il faut la respecter.

La première chose qu'il faut comprendre, c'est que, dans toutes négociations, même si elles sont techniques, c'est la dignité. Oui, nous sommes les combattants de la dignité. L'Afrique veut le respect. Je négocie avec toi un prêt. Si tu veux, tu me le donnes. Si tu ne veux pas, tu le dis. Tu peux me dire : “Je te fait un prêt, voici les conditions”. Moi aussi, j'accepte tes conditions ou je ne les accepte pas. Mais l'irrespect ne peut pas être accepté par les générations à venir. L'indignité ne peut pas être acceptée par les générations à venir.

Cher ami du MEDDA, nous sommes particulièrement heureux de ta présence. Dis au peuple français que ni le gouvernement ivoirien, ni le président de la République de Côte d'Ivoire, ni le peule ivoirien n'a rien contre le peuple français. Je suis un représentant de ceux qui ne peuvent rien avoir contre le peuple français.

Mon père s'est battu avec ses camarades soldats français contre l'armée nazie. Mon père s'est battu pour que l'Allemagne nazie ne triomphe pas. Il était dans cette armée-là, qui, hélas, a été vaincue en 1940. Il était soldat volontaire. Le sergent Koudou, tel est son nom, a été prisonnier de guerre. Evadé, il a repris les armes. Il a été blessé de guerre, et il en porte encore les cicatrices. Soigné, il a été ramené à Fréjus. Il s'est reposé, puis il est rentré en 1942 par la voie maritime. Le prénom que je porte, Laurent, était le prénom du capitaine français qui commandait la compagnie de papa. Il est mort dans les bras de mon père. C'était un Français, blanc comme toi.

Dans mon combat, j'ai vécu en France. J'ai fait six ans et demi d'exil en France sans argent. Mais il fallait que cet exil ait lieu pour que le combat soit popularisé au niveau mondial. Ce sont des amis français qui m'ont logé durant ces six ans et demi. Ce sont des camarades français qui m'ont logé. Donc nous n'avons absolument rien contre le peuple français. Mais, quiconque, au nom des intérêts idéologiques ou économiques, veut nous asservir nous trouvera debout! (applaudissements).

Le griot de Soundjata chantait (il fredonne une chanson en malinké). Ça veut dire que la mort vaut mieux que le déshonneur. Je ne me laisserai pas déshonorer et je ne laisserai pas déshonorer le peuple qui m'a élu. Jamais ! applaudissements).
Je voudrais vous dire que cette crise est en train de finir, et elle va finir. Nous en sortirons par la voie constitutionnelle. Il n'y a pas d'autres voies. Je lis des amusements sur certains journaux du genre: “Le président va peut-être choisir le référendum”; “ le président ne va peut -être pas choisir le référendum”. Ce n'est pas une question de choix du président. C'est une obligation cons - ti - tu - tion - nelle !!!(ovations).

La Constitution dit : “Si vous voulez modifier la Constitution, faites ceci, faites cela et enfin faites cela”. On a fait ceci, on a fait cela et puis, on va s'arrêter-là ? (nooon! répond la salle). Donc allez dire aux gens que nous nous sommes engagés tous dans la voie constitutionnelle de la modification de notre propre Constitution. La Constitution, c'est nous, c'est nous-mêmes. C'est notre sang. Nous avons commencé. On a introduit le texte au parlement. Le parlement pouvait bloquer le texte. Le vote du parlement ne signifie pas la modification constitutionnelle. Le parlement n'a pas compétence pour modifier la constitution. Ni le président de la République, ni le gouvernement, ni le parlement n'ont compétence pour modifier l'article 35 et l'article 55 de la Constitution. Eux (les députés), ils peuvent seulement dire au peuple : “Nous t'amenons le texte ou nous le bloquons”. Voilà le rôle du parlement. Au niveau du conseil des ministres, le président de la République peut bloquer le texte. Il ne l'a pas fait. Au niveau du parlement, l'Assemblée nationale peut bloquer le texte. Elle ne l'a pas fait. Le parlement a dit : “Peuple, nous te donnons ton texte. Tu veux le modifier ou tu ne veux pas le modifier. Fais-en ce que tu veux”. Voilà ce que le vote du parlement veut dire. Relisez les articles 126 et 127 de la Constitution de Côte d'Ivoire.

Donc sur ce plan-là, il faut être serein. C'est moi qui vais vous parler à la télévision, pour dire tel jour, on va aller au référendum. D'autres personnes parlent. Elles disent : “nous, on n'aime pas le référendum”. Mais, on ne vous demande d'aimer le référendum. Vous voulez la modification constitutionnelle ? La seule voie pour la modifier, c'est le peuple, et on va aller voir le peuple. S'il le modifie, il le modifie. S'il ne le modifie pas, il ne le modifie pas. Mais si c'est pour ça que vous avez fait un coup d'Etat, il faut que vous y renonciez désormais. Je voudrais dire à tous les présidents qui vont venir qu'il ne faut plus qu'ils fuient devant un petit pétard. C'est cette fuite qui favorise les coups d'Etat.

A tous les jeunes de Côte d'Ivoire, je voudrais vous dire que chaque génération fait son travail. La génération des Houphouet, c'était de proclamer l'indépendance. Ce qu'ils ont fait est bien ou n'est pas bien, ça c'est de l'histoire. La génération que je représente, c'est de donner la dignité, c'est de forcer le respect. C'est de faire en sorte que chacun, dans notre pays, se sente chez lui. C'est de faire en sorte que la colonisation que nos parents avaient combattue ne revienne sous une autre forme. C'est de faire en sorte que chacun puisse avoir du travail et manger. C'est de faire en sorte que chacun puisse mettre son enfant à l'école et l'éduquer. C'est de faire en sorte que si chacun est malade, il puisse se soigner. C'est ça notre génération. Le reste du combat vous appartient.

Vous les jeunes, vous aurez d'autres combats à venir. Parce qu'une action, lorsqu'elle est menée, elle crée toujours des déchets que vous serez amenés à nettoyer après. Je me bats dans le cadre de ma génération aujourd'hui. Je me bats sur la terre que nos ancêtres nous ont laissée. Je mène le combat que nos parents ont mené avant moi. Il y en a qui meurent aujourd'hui. Sachez qu'au temps de la pénétration coloniale, beaucoup des nôtres sont morts. Y compris Gbagbo Likpi, mon grand-père ; Amangoua est mort en exil au Gabon. Nous venons de rapatrier ses restes. Au temps de la lutte pour l'indépendance, il y a eu encore beaucoup de morts: Bouaflé, Dimbokro, Adzopé, Grand-Bassam, Treichville, Séguéla, Agboville; il y a eu beaucoup de morts. Aujourd'hui, la dame que vous voyez-là (la mère du jeune manifestant décapité le 9 novembre par l'armée française devant l'Hôtel Ivoire), son fils est mort dans le cadre du combat que nous mènons pour la dignité et le respect. Il faut que, chez nous ici, nous soyons libres d'ouvrir les bras pour accueillir tous nos frères qui arrivent. Il ne faut pas qu'on nous mette le fusil sur la tempe pour nous obliger à faire quelque chose.

Je ne comprends pas ceux qui nous agressent parce qu'on peut arriver au même résultat en étant serein. Nous accueillons déjà tout le monde. Je fais ma part et je le ferai sans aucune faiblesse, sans reculade, sans crainte parce que je sais que je fais mon devoir. Je sais que je lutte au nom de toute une génération d'Africains. Ce qui se passe en Côte d'Ivoire est regardé en Afrique, en Amérique latine, en Asie, et, un jour, vous saurez tous les témoignages que je reçois. Même ceux qui se réunissent comme ça (rires dans la salle) après ils viennent pour dire : “On n'est là ,mais vraiment, c'est difficile”.

Donc les jeunes, voilà ce que je vais vous laisser. Aucun pays ne se développe sans combat. Même les pays occidentaux qui ont envers nous quelquefois des attitudes dédaigneuses ont traversé des périodes dures dans leur histoire pour arriver à se développer. Les Etats-Unis ont connu la lutte d'indépendance. Ils ont connu aussi la guerre de sécession. La France a connu un siècle de chaos: la révolution française de 1788, celle de 1789, enfin, les restaurations, l'empire de nouveau, la révolution. L'Allemagne a connu l'unité allemande avec Bismark l'unité italienne avec Karvour. Tous ces pays ont connu leurs temps de tristesse, de pleurs et leurs morts. Je vous laisserai demain, un pays debout.

Je vous laisserai un pays libre et prospère. Haut les cœurs, haut les cœurs, haut les cœurs (“On y va”, a répondu à trois reprises la salle).
Propos recueillis par Laurent Brindou




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jusqu´à quand?

Message par mahomed » déc. 20, 04 3:57 pm

Jusqu´à quand Gbagbo, ce grand historien, pense-t-il pouvoir gouverner un pays divisé avec de la simple réthorique? Il a perdu le nord (dans les deux sens du mot), j´espère qu´il saura se ressaisir à temps et ne pas sombrer dans ce funeste jeu de mot avec la constitution (et/ou) comme l´a fait le pauvre général Guéi en son temps.



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